Plein de nouveautés sur le front du Vivant en cette fin d’année. Avec, entre autres, la possibilité de trouver de belles idées cadeaux à glisser sous le sapin, oui oui !
Il était attendu : dans la lignée du précédent hors-série dont Alain Damasio était le rédac-chef invité au sujet du Réveil des Imaginaires, ce nouvel opus de 196 pages a laissé la main à Baptiste Morizot, LE philosophe dont tout le monde parle en ce moment. Et pour cause : sa pensée offre une voie utile et inspirante pour remettre les enjeux du sauvage au coeur de nos sociétés. Esquivant habilement les polémiques issues de positionnements extrêmes, l’auteur des Diplomates, de Manières d’être vivant ou plus récemment de Raviver les braises du vivant (Actes Sud Editions) s’appuie sur ses expériences sur le terrain, à pister le loup, à acheter des espaces forestiers ou à côtoyer des paysans-diplomates, pour développer sa vision d’un autre rapport au non-humain que nous négligeons-exploitons-malmenons-ignorons-détruisons au quotidien.
Conçu en trois parties, (prêter attention au vivant, défendre le vivant et s’allier au vivant) ce magazine vous donnera un bon aperçu, condensé, de la pensée de Morizot, illustré par des reportages et des prises de paroles d’intellectuels et d’acteurs qui se situent dans la même mouvance intellectuelle. Les partis pris sont clairs, la volonté de politiser cette question toujours aussi affirmée, l’effort pédagogique porté par une ligne journalistique exigeante, là aussi. Bref, parfait petit outil informatif pour entrer en matière.
Vous connaissez les notions d’empreinte CO2 et d’empreinte écologique ? Eh bien sachez qu’il est possible de calculer son empreinte forêt, comme le propose l’association Envol Vert depuis 2018. Après avoir calculé l’Empreinte Forêt moyenne des Français et des Colombiens, l’association lance pour la première fois le calcul de l’Empreinte Forêt spécifique de différentes catégories d’un produit : le poulet. « Importée, standard, certifiée, Label Rouge, issue d’agriculture biologique, Bleu Blanc Coeur, nourrie sans OGM, volaille fermière de Loué et volaille nourri avec du soja local, toutes ces catégories ont une Empreinte Forêt différente » explique l’ONG. « Réduire sa consommation de volailles, favoriser des animaux nourris aux protéines végétales locales ou avec du soja garanti sans OGM issu de zone non à risque ou avec des garanties de protection des forêts sont des actions à pousser pour réduire son Empreinte Forêt » ajoute-t-elle encore, en classant les marques selon leur impact.
De quoi réfléchir à deux fois avant de choisir sa volaille à Noël, si jamais vous n’êtes pas encore végétarien 🙂
A noter : l’association propose d’offrir des arbres à Noël, une action symbolique et utile, avec une jolie sélection détaillée ici.
Puis si vous cherchez un bel ouvrage sur les forêts, je vous conseille celui-ci, mis en avant sur le site de l’association Francis Hallé pour la forêt primaire. Annik Schnitzler, professeure d’écologie à l’Université de Lorraine, récemment retraitée, y est d’ailleurs interrogée sur sa vision, c’est passionnant !
On reste en forêt, mais pour mieux s’immerger dans un joli projet artistique que l’on m’a partagé récemment : réalisé par un plasticien (Hugo Mairelle) et un photographe (Vincent Muller) dans le Grand Est, inspiré du masque et des peuples autochtones, le projet Être(s) questionne notre rapport à la nature – cette « nature » qu’on imagine extérieure à nous étant un concept inventé par l’Occident, comme l’explique bien l’anthropologue Philippe Descola.
Avec cette métaphore artistique, les deux jeunes hommes opposent aux logiques extractivistes et consuméristes de nos sociétés actuelles une approche esthétique inspirée des peuples qui vivent en relation étroite avec leur environnement – forts de leur savoir-faire manuel, de la créativité, la connaissance de l’environnement, la spiritualité, le zéro-déchet, incarnés par le masque dans ce projet artistique, voyez plutôt :
« Les masques sont crées sur chaque site puis retournent à la terre après notre passage » explique Hugo Mairelle, « ils incarnent la passerelle du sensible (ce qui nous entoure) au spirituel (la dimension holistique). Ainsi l’origine et l’unité du vivant s’épanouit dans la diversité, une diversité mise à mal par les activités humaines, notamment au travers de l’artificialisation des terres et de l’agriculture chimique, l’enjeu étant de se réinsérer dans cette « économie du vivant » cette réciprocité organique dont une majorité de l’humanité est sortie avec les ressources fossile« .
Exposé depuis deux ans dans la région Alsace lors d’événements culturels, en milieu scolaire, en galerie et en maison de la nature, le projet Être(s) a aussi donné naissance à un ouvrage récemment financé sur la plateforme Ulule. Ils organisent aussi des ateliers qui donnent vraiment envie de s’y mettre, quitte à être masqués !
Cette enquête m’incitant à faire de la veille sur les publications récentes sur nombre de thématiques liées au vivant, je profite de ce petit article pour vous conseiller d’autres ouvrages inspirants, c’est un peu mon « bonus » pour vous aider à faire vos choix de fin d’année :
Dans la série beaux livres, Désirée (Tana Editions) plaira à tous les gourmets et amoureux des fleurs : c’est beau, c’est frais, et les trois autrices, Mathilde Bignon , Audrey Venant et Masami Lavault savent partager avec goût leurs passions : pâtisser, cultiver, fleurir, des savoirs-faire qu’elles partagent avec générosité, avec beauté, et avec la volonté d’engager ces pratiques sur les voies de la durabilité. Elles montrent que c’est possible, même en ville, même à Paris, et on a envie d’une chose à les lire : se dépêcher d’aller à leur rencontre, dès que possible, dans leur café ! Il n’est d’ailleurs pas impossible que j’aille voir de plus près leur production florale un de ces quatre; je vous tiendrai au courant.
Toujours chez Tana, pour les femmes de votre entourage, un ouvrage dense – Après la pluie, Horizons écoféministes de Solène Ducretot et Alice Jehan, avec les témoignages de 60 militantes qui partagent là leur vision du mouvement éco-féministe et proposent de nombreuses réflexions sur la puissance des femmes et la manière dont elles peuvent se déployer en mode « grandeur nature ».
Chez Equateurs, je vous conseille Anaïs s’en va-t-en guerre, d’Anaïs Kerhoas. Sujet d’un documentaire magnifique de Marion Gervais (en 2014), la jeune femme offre là un récit à son image : frais, direct, sincère et touchant. Cette « fée des champs et sorcière des temps modernes » sait s’écouter, faire marcher sa volonté et aller au bout de ses rêves. C’est un récit qui se lit facilement et qui fait du bien, tout simplement.
Il sera possible de le compléter avec La bhagavad Gîtâ, de Colette et Emilie Poggi aux éditions des Equateurs. Les deux autrices y décortiquent la philosophie indienne et l’art d’agir tel qu’enseigné en Inde. Véritable source de réflexion et de méditation pour les temps qui courent, cet ouvrage nous donne facilement les clefs de la pensée orientale. « La vie est un mystère qu’il faut vivre, non un problème à résoudre » indiquait ainsi Gandhi, fort de ces enseignements qui invitent à harmoniser nos actes, paroles et pensées au dharma, ou Orde cosmique…
Enfin, je terminerai avec un autre beau livre paru chez l’Aube : Boris Cyrulnik et Edgar Morin échangent dans Dialogue sur la nature humaine. Accompagnés par les belles illustration de Pascal Lemaître, leurs échanges nourrissent aussi la réflexion, en profondeur, sur nos natures profondes et notre lien au monde… en cette année 2020, ça fait du bien, et ça ouvre les chakras pour 2021 !
++ NOTA BENE ++ Pensez aussi aux abonnement à La Salamandre, aux livres parus dans leur collection et à ceux que j’ai pu vous conseiller ici ou là dans ces articles (au sujet des araignées s’il y a des phobiques dans votre entourage, les livres de Christine Rollard sont géniaux)
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